Le commandant Tomas Borge,
cofondateur du mouvement de guérilla Front sandiniste de libération nationale
(FSLN), aujourd'hui de nouveau au pouvoir au Nicaragua, est mort hier à 81 ans,
et le gouvernement a décrété un deuil national de trois jours.
"Le
commandant Tomas Borge est arrivé au terme de sa vie terrestre, sa fertile vie
révolutionnaire", a annoncé "avec une profonde douleur" l'épouse
du président nicaraguayen Daniel Ortega, Rosario Murillo, qui est porte-parole
du gouvernement, à la Radio Ya (officielle). Une veillée funèbre devait être
organisée aujourd'hui au Palais national, bâtiment historique qui donne sur la
place de la Révolution, à Managua.
Né le 12 août 1930 à
Matagalpa, il avait adhéré dans sa jeunesse au combat contre la dictature
somoziste et créa le FSLN en 1961 avec Carlos Fonseca Amador, en s'inspirant du
patriotisme du leader paysan Augusto César Sandino, assassiné en 1934 sur
l'ordre d'Anastasio Somoza. Ayant reçu une formation militaire à Cuba quand il
participait à la guérilla, une fois les Sandinistes au pouvoir, il a organisé
le ministère de l'Intérieur en s'appuyant sur un service de renseignement et
des troupes d'élite, qui bénéficiaient de l'appui de conseillers cubains.
Marié à la péruvienne
Marcela Perez, il eut avec elle trois de ses six enfants, dont l'un adopté
après la mort au combat de son père, un dirigeant de la guérilla. Borge sera
inhumé aux côtés de Carlos Fonseca, qui repose dans un petit mausolée, dans un
coin de la place de la Révolution. Borge, atteint d'un cancer des poumons, est
mort à l'hôpital militaire Davila Bolanos de Managua, où il avait subi le 6
avril une intervention chirurgicale du thorax à la suite d'une affection
pulmonaire qui s'est aggravée après l'opération en raison de son âge et de
complications dues à son diabète.
Le commandant Borge était le seul des
fondateurs du Front sandiniste - créé en 1961-- à avoir survécu à
l'insurrection lancée par le mouvement de guérilla en 1979 contre la dynastie
dictatoriale des Somoza, qui a gouverné pendant 45 ans le Nicaragua.
En 1974, le FSLN avait
organisé une prise d’otage qui avait été aussitôt étouffée par les mesures
adoptées par Somoza, le dictateur de l’époque. Ce dernier établira l’état de
siège et pratiquera une politique de répression sanglante sur la population. La
dictature somoziste entreprendra un nettoyage systématique des montagnes du
Nord du pays. Plus de 3 000 paysans seront tués et le travail
d’organisation des masses effectué par le FSLN sera disloqué.
En 1975, en pleine crise, Le FSLN éclate en 3
tendances :
1. La tendance prolétarienne : La
moins nombreuse des trois partis. Elle se lancera dans un travail
d’organisation des ouvriers Nicaraguayens.
2. La tendance guerre populaire prolongée :
Héritière légitime de l’organisation créée en 1961, elle veut le renforcement
de l’appareil militaire.
3. La tendance insurrectionnelle :
Elle est majoritaire. Pour elle, la priorité est de renverser la dictature,
même si, pour ce faire, une alliance avec certains secteurs de la bourgeoisie
est nécessaire.
Borge
est alors en prison et a été atrocement torturé par les gardes nationaux
somozistes.
Le 22 août 1978, un
commando de 23 militants sandinistes dirigés par le commandant Eden Pastora
s'empare du palais national de Managua et de 1500 otages, dont la moitié sont
des membres de l'Assemblée législative ou des hauts fonctionnaires du
Nicaragua. Ce coup d'éclat fait instantanément de Pastora un héros national.
Grâce
à l'intervention de l'évêque de Managua, Mgr Miguel Obando y Bravo, Somoza cède
aux demandes des sandinistes : versement d'une rançon de $500 000,
libération de 59 prisonniers politiques (dont Thomas Borge) et diffusion
publique d'un appel à l'insurrection générale.
Lors de la libération des
prisonniers, le cortège est applaudi par des milliers de personnes. Planifié
avant le lancement d'une grève générale lancée par le Front national
d'opposition, cette opération constitue un tournant pour les rebelles
puisqu'elle bloque un éventuel coup d'État de la garde nationale, établissant
une junte militaire et civile qui barrerait la route aux Sandinistes.
L'opposition en sort galvanisée et le gouvernement, appuyé par les États-Unis affaibli.
Humilié, Somoza remplace plusieurs officiers pour empêcher un coup d'État.
Durant la guerre civile qui suit, Pastora, qui commande le front sud,
jouera un rôle clé en affrontant les meilleures troupes somozistes.
- En août 1978, un commando Sandiniste dirigé par
Eden Pastora s’empare du palais national et obtient la libération de
prisonniers politiques dont Tomas Borge, dernier survivant des fondateurs du
mouvement.
- Borge œuvrera à la
réunification des trois tendances du mouvement sandiniste. Après la chute
de Somoza, il fut un redouté ministre de l'Intérieur pendant les 10 ans du
premier gouvernement sandiniste (1979-1990). C'est lui qui avait déclaré
lorsque les Sandinistes avaient renversé le dictateur Somoza :
"L'aube a cessé d'être une tentation, el amanecer dejà de ser una
tentaciòn" avant d'ajouter "Notre vengeance sera notre pardon".
"Tomas est de ces
morts qui ne mourront jamais", car il restera dans la mémoire
révolutionnaire, celle du Front sandiniste, et "dans le coeur du Nicaragua
heureux et libre" a déclaré Mme Murillo la voix brisée par l'émotion.
Borge fut l'un des rares commandants de la guérilla qui a soutenu Ortega, quand
le Front - très divisé - s'est retrouvé dans l'opposition avant de revenir au
pouvoir en 2007.
Au moment de sa mort, Borge (considéré par certains comme le
plus dogmatique et le plus radical des dirigeants sandinistes) exerçait les
fonctions de secrétaire national adjoint du FSLN et d'ambassadeur au Pérou et
en Équateur. Aux élections de 2011, il avait été élu député.
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