Assassinat de Dimitri Bourgeaud : quatre hommes mis en
examen
Publié le samedi 17 mars 2012 à 07h14
Le procureur d’Ajaccio, Thomas Pison, et le colonel
Christian Rodriguez, commandant la région de la gendarmerie de Corse se sont
dits satisfaits du résultat. Ils se refusaient hier à tout triomphalisme.
La précaution a été utilisée d'entrée de jeu par le
procureur Pison, en début de conférence de presse, hier après-midi : « Il y a
quatre personnes mises en examen. Mais elles nient toutes les faits qu'on leur
reproche. »Pas de triomphalisme donc. Mais, de la part du procureur d'Ajaccio,
l'impression que les services de la gendarmerie et ceux de la justice ont
travaillé avec efficacité. En début de semaine, après cinq mois d'enquête sur
l'assassinat de Dimitri Bourgeaud, quinze personnes étaient interpellées à
Ajaccio et dans les environs.
Les gendarmes de la section de recherches de la gendarmerie
s'étaient fait appuyer par le GIGN pour procéder à certaines des arrestations.
Au fil des jours et des auditions, la plupart des personnes entendues sont
ressorties libres de garde à vue. Jeudi soir, Hamza Ouerghi (20 ans) et Pascal
Dionisi (43 ans) étaient mis en examen et placés sous mandat de dépôt. Le
premier pour subornation de témoin. Le deuxième pour complicité de meurtre en
bande organisée. Jeudi soir, Me Aljia Fazaï s'insurgeait contre le placement en
détention de Hamza Ouerghi estimant que la prison n'allait en rien permettre à
l'affaire de progresser, d'autant son client évolue très à la marge du dossier.
Hier, Me Antoine Vinier-Orsetti tenait à préciser que son
client, Pascal Dionisi était mis en examen non pour assassinat en bande organisée
(comme cela avait été écrit par erreur) mais pour complicité.« Il s'est
largement expliqué lors de sa garde à vue. Il conteste formellement les faits
qui lui sont reprochés. Aucun élément matériel ne permet de le relier aux faits
», assure Me Vinier-Orsetti. L'avocat précise que la mise en examen de son
client vient de « rumeurs colportées qui viennent trop souvent polluer le débat
judiciaire... »
Éléments matériels et témoignages
Hier après midi donc, deux autres hommes étaient mis en examen
par le juge Hélène Gerhards. Dumè Canale (40 ans) était mis en examen pour
complicité de meurtre en bande organisé et Romain Salvini (22 ans) pour meurtre
en bande organisée. Les deux hommes ont également été mis en examen pour détention
d'armes de 1re et 4e catégories. Au cours des perquisitions, les enquêteurs ont
découvert notamment chez Dumè Canale plusieurs armes (armes de poing et
fusil-mitrailleur). Les deux hommes nient les faits qu'on leur reproche. Lors
de la conférence de presse, le colonel Christian Rodriguez affirmait cependant
que les enquêteurs se sont appuyés, tant sur des éléments matériels que sur des
témoignages. « Nous n'avons jamais eu d'idée préconçue sur cette affaire et
nous n'avons négligé aucune hypothèse »,affirmait-il hier.
Quel mobile ?
Ni le procureur de la République d'Ajaccio, ni le colonel
commandant la région de gendarmerie n'ont précisé quel était le mobile supposé
de l'assassinat perpétré le 25 septembre à 5 heures du matin sur le parking de
la discothèque le Pub Saint-James à Porticcio. À Ajaccio, on évoquait une «
guerre » pour la prise de contrôle d'établissements de nuit. Mais on parlait également
d'une altercation et de coups entre la victime et d'autres personnes qui
n'auraient pas supporté d'avoir le dessous. Aucune de ces deux thèses n'a été
confirmée ni infirmée. Et, pour l'heure, il reste difficile de savoir pourquoi
Dimitri Bourgeaud est tombé sous une pluie de balles de 11,43, à tout juste 19
ans.
Les personnes interpellées à Ajaccio seraient proches de l'équipe
du Petit bar.
(Publié le jeudi 15 mars 2012 à 07h30)
Les auditions se poursuivent dans les locaux de la
gendarmerie d'Aspretto, après les interpellations de mardi dans la région
d'Ajaccio. Hier, une dizaine de personnes restait en garde à vue dans l'affaire
de l'assassinat de Dimitri Bourgeaud. Une personne avait été remise en liberté à
l'issue de son audition mardi soir et d'autres pourraient recouvrer leur liberté
dans les 24 heures qui viennent. Mais une partie des hommes entendus va très
vraisemblablement être présentée au juge Hélène Gerhards avant la fin de la
semaine. La magistrate ajaccienne qui a qualifié les faits d'assassinat en
bande organisée a délivré un certain nombre de commissions rogatoires aux enquêteurs
de la section de recherches de la gendarmerie et attend des réponses par
rapport à un certain nombre d'éléments matériels recueillis au cours des cinq
mois d'enquête.
De source proche du dossier, on confirmait hier que les
personnes interpellées et entendues depuis mardi sont « proches de l'équipe du
Petit bar ».Sans toutefois confirmer de manière formelle les identités qui
circulent sur la place d'Ajaccio.
Ce qui est certain c'est qu'une partie des personnes placées
en garde à vue a été extraite de prison pour être entendue dans cette affaire.
Calibre 11,43
Le 25 septembre dernier, Dimitri Bourgeaud qui achevait une
saison comme portier au Pub Saint-James avait été pris pour cible par un unique
tireur à la fermeture de l'établissement à 5 heures du matin. Il avait été
atteint par plusieurs projectiles de calibre 11,43 (huit douilles avaient été
retrouvées sur les lieux) alors qu'il manœuvrait avec sa voiture sur le parking
de la discothèque. Au moment des faits, l'hypothèse de la querelle de fin de
nuit avait été évoquée. Il semble qu'au cours des mois écoulés, l'enquête s'est
orientée dans une toute autre direction.
Des proches de Dimitri Bourgeaud auraient voulu le venger
La justice estime que des proches de Dimitri Bourgeaud, tué
en 2011 à Porticcio, ont formé une association de malfaiteurs afin de venger sa
mort..
Voulaient-ils constituer une bande afin de venger leur ami
Dimitri Bourgeaud assassiné la nuit du 25 septembre sur le parking du pub
Saint-James à Porticcio ? Telle est la conviction de la juge ajaccienne Hélène
Gerhards qui a mis en examen vendredi quatre hommes pour association de malfaiteurs
en vue de commettre un crime.
Certains d'entre eux sont également soupçonnés de vol à main
armée en bande organisée et d'avoir par ricochet enfreint la législation sur
les armes. « Trois mis en examen ont également été placés sous mandat de dépôt,
tandis que le quatrième a fait l'objet d'un contrôle judiciaire. Une cinquième
personne est témoin assisté », a confirmé le parquet d'Ajaccio qui n'a pas révélé
les identités, mais en indiquant qu'ils sont « tous connus de la justice ».
Coordination police gendarmerie
Deux d'entre eux avaient notamment été condamnés pour
l'attaque à la disqueuse du Crédit mutuel à Ajaccio dans la nuit du 5 décembre
2011 et pour d'autres infractions. Selon la justice, ils sont proches de
Dimitri Bourgeaud. Quelles personnes étaient-elles visées ? La justice préfère«
pour des raisons de sécurité rester muette à ce sujet », mais elle en dénombre
au moins deux. L'affaire s'est accélérée au lendemain de la dernière visite
ministérielle de Manuel Valls et de Christiane Taubira. Mardi dernier, une
personne est interpellée sur le Continent, tandis que trois autres sont
extraites de la prison de Borgo et une de la maison d'arrêt d'Ajaccio.
Toutes sont directement placées en garde à vue à la caserne
Bacciochi et au commissariat d'Ajaccio pendant 96 heures. Le dossier, une fois
n'est pas coutume, est en fait suivi par la police judiciaire et la gendarmerie
depuis près d'un an. Les interrogatoires de garde à vue ont d'ailleurs été menés
par un policier et un gendarme. « C'est un travail remarquable, un travail de
fourmi qui remonte à plusieurs mois », remarque le parquet ajaccien. Le dossier
est surtout« emblématique », pour un enquêteur, car il illustre différentes réalités.
Une "planque" retrouvée avec des armes
Tout d'abord, celle de la préparation d'un crime, mais aussi
les différents réseaux mis en place. « Une équipe voulait se constituer pour
venger Dimitri Bourgeaud avec des personnes multicarte », analyse-t-il. Selon
la version étayée par les investigations, le groupe aurait réagi après
l'assassinat du jeune homme de 19 ans tué à Porticcio en multipliant les
actions.
« Nous estimons que ce groupe est responsable du
moto-jacking d'un scooter T-Max à Ajaccio, en novembre 2011 qui aurait pu
servir à monter sur des assassinats », poursuit-il. Ces éléments prenaient du
relief après l'affaire du casse raté du Crédit mutuel à Ajaccio qu'avaient déjoué
les policiers de la Bac (brigade anticriminalité). A l'issue de perquisitions,
plusieurs objets étaient retrouvés dans un appartement de la région ajaccienne.
« Des armes et les clés du T-Max (qui avait été repeint après le vol) avaient été
saisis dans ce lieu qui devait servir de planque », détaille une source proche
du dossier.
A partir de ces évolutions transmises par la sécurité
publique sur l'affaire du Crédit Mutuel, la juge Hélène Gerhards co-saisit la
police judiciaire et la gendarmerie au sein d'une « équipe mixte ».
Une série d'écoutes téléphoniques complète le travail
d'environnement.« En plus du matériel qui avait été rassemblé, des repérages
avaient été effectués autour du domicile de deux personnes habitant à Ajaccio »,
décrypte un enquêteur. « On est dans une thématique de vengeance et en agissant
ainsi, la justice a fait un travail de prévention », ajoute une source policière.
Selon un avocat d'un des mis en examen qui ne souhaite pas
s'exprimer pour l'heure,« cette affaire ne tient pas et semble bizarre ». La
suite se jouera de manière contradictoire devant le tribunal correctionnel
d'Ajaccio.
Le premier assassinat de l'année en Corse a été perpétré
mardi à Ajaccio où un gérant d?établissement de nuit connu de la police a été
criblé de balles au volant de sa voiture non loin d'une manifestation
d'enseignants.
Dominique Lorenzi, 40 ans, surnommé "L'Indien", a été
tué à 10H45 à bord d'une petite voiture sans permis qu'il conduisait près du
rectorat devant lequel plusieurs dizaines d'enseignants étaient rassemblés pour
dénoncer une énième réforme de l'éducation.
"On a d'abord cru que c'était des claquements de pétards",
a raconté terrorisée une manifestante.
Une douzaine de balles de calibre 9mm ont été tirées au
pistolet automatique sur le véhicule de la victime dont le pare-brise était
perforé de quatre impacts à hauteur de la tête du conducteur.
Le guet-apens, sur un mode opératoire très professionnel,
avait été tendu par un commando de deux individus casqués à bord d'une moto ou
d'un scooter arrivant en sens opposé à celui de la victime sur le boulevard
Pascal Rossini, l'une des artères les plus fréquentées de la cité impériale, a
expliqué le procureur de la République, Xavier Bonhomme.
Le passager a ouvert le feu sur le conducteur, s'approchant
ensuite à pied pour l'achever. Les deux hommes sont parvenus à s'enfuir en se
noyant dans la circulation.
Une douzaine de douilles ont été trouvées sur place.
La compagne de la victime qui le suivait en voiture a été
hospialisée dans un état de choc.
"Violence extrême"
"C'est malheureusement toujours le même sentiment de
tristesse et d'impuissance", a déclaré sur place le maire (DVG) d'Ajaccio,
Simon Renucci, à France 3 Corse Via Stella.
Le ministre de l'Intérieur, Manuel Valls, a fermement
condamné cet "acte de violence extrême", assurant dans un communiqué
que "tous les moyens sont mis en ?uvre pour interpeller les auteurs et les
déférer devant la justice".
En attendant, une cellule psychologique a été mise en place
au rectorat pour assister les enseignants et autres fonctionnaires présents
choqués par cette nouvelle scène d'ultra violence dans un quartier où plusieurs
règlements de comptes ont déjà été perpétrés.
Très connu à Ajaccio, notamment des services de police,
Dominique Lorenzi gérait un pub de nuit dans la cité balnéaire de Porticcio, le
Saint James, sur la rive sud du golfe d'Ajaccio. Un vigile âgé de 19 ans avait été
tué par balles dans cet établissement le 25 septembre 2011.
Déjà entendu par les enquêteurs dans plusieurs dossiers
criminels dans la région d'Ajaccio, la victime, qui avait géré plusieurs débits
de boissons de la cité impériale, n'avait jamais été mise en examen.
La police judiciaire et la section de recherche de la
gendarmerie ont été co-saisies pour cette enquête.
Lorenzi est la première victime d'un assassinat depuis le début
de l'année en Corse. Deux tentatives ont été commises depuis le 1er janvier,
notamment contre un individu déjà condamné par la justice, Christophe Pieri,
blessé par balles le 1er février en Haute-Corse.