dimanche 8 avril 2012

Deux assassinats et une tentative le jour de Pâques en Corse


Jo Sisti lors d'une conférence de presse donnée en faveur de son fils
Comment dire, hurler son sentiment d'horreur quand le jour de Pâques, signifiant pour les croyants l'espérance, la vie, la résurrection, deux hommes tombent sous les balles d'assassins tandis qu'un autre, à Ajaccio, se bat contre la mort alors qu'il a été victime d'un attentat à la bombe. 

Deux hommmes ont été abattu près de Vezzani. J'avais connu il y a des années l'une des victimes, Jo Sisti. Nous étions militants de l'Accolta naziunali corsa. Il en était devenu le secrétaire général. Il avait été l'un des signataires des accords de Miggliacciaru en 1999, sorte de pacte de non-agression signé alors même que la Corse subissait la répression succédant à l'assassinat du préfet Erignac.


Je l'avais retrouvé lors du mariage de Patrizia Poli dans la banlieue bastiaise.  Était également présent ce jour-là Vincent Stagnara qui s'est suicidé le 2 janvier 2010 à Bastia. Je ne sais rien des circonstances de la mort de Jo Sisti et de celle de son beau-frère, Jean-Louis Chiodi exécutés sur la route de Vezzani. Mais je sais à quel point ces morts nous glacent nous les Corses qui vivons sur cette terre si belle et qui, pourtant, depuis des millénaires est une terre sanglante. 

Jo Sisti était intervenu publiquement pour négocier la reddition de son fils accusé d'avoir tiré sur des hommes du GIGN. http://www.corsematin.com/article/bastia/carlu-andria-sisti-sest-rendu-aux-autorites-judiciaires.515758.html. Ceux qui ressentent la Corse pressentent une nouvelle guerre qui se prépare en Haute Corse une guerre qui mettrait aux prises une partie de la voyoucratie avec une partie des nationalistes. Bien qu'en Corse tout soit possible dans le domaine des assassinats ce qui signifie que dans le contexte tourmenté de la plaine orientale, il puisse également s'agir d'un différend d'ordre privé. Jo Sisti déclarait lors d'une conférence de presse donnée avant que son fils ne se rende à la justice : "« La microrégion de la Plaine orientale connaît actuellement un climat de violence multiforme qui touche des honnêtes gens".

Le Front de libération nationale de la Corse (FLNC) avait revendiqué l'assassinat, le 28 octobre dernier à Moriani par l'un de ses commandos, de Christian Leoni, un chef d'entreprise de 49 ans, présenté par les autorités judiciaires comme "un membre de la Brise de Mer".

Dans ce communiqué authentifié, le FLNC indiquait "avoir procédé à l'élimination physique de Christian Leoni, responsable du groupe mafieux auteur de l'assassinat de notre militant Philippe Paoli."

Après la mort de Charles-Philippe Paoli, indépendantiste et militant de l'organisation assassiné le 29 juin à Folelli près de Bastia http://www.corsematin.com/article/faits-divers/charles-philippe-paoli-victime-dun-guet-apens-a-folelli.396244.html, le FLNC avait renoué avec les conférences de presse clandestines.  Annonçant alors que ceux qui « ont accompli cet acte n'ont pas mesuré sa portée, ni ses conséquences... Notre organisation saura faire face... Cette mort est injuste et inexplicable, mais elle renforce notre détermination »http://www.corsematin.com/article/corse/le-flnc-revendique-«-lelimination-physique-»-de-christian-leoni.521595.html.

Le 23 janvier dernier, Albert Pieri, ancien directeur sportif du Sporting Club de Bastia avait été retrouvé dans un ravin en contrebas de la route du Cap, commune de Brando. Albert Pieri résidait à Ghisonaccia, une région qui connaît un regain de violence depuis plusieurs années. Cadre dans une entreprise du BTP, la SNC Vendasi, il avait également été directeur Sportif du SCB. http://www.corsematin.com/article/papier/albert-pieri-victime-dun-guet-apens-mortel-sur-une-route-du-cap-corse.565161.html Il était le frère d'un compagnon de lutte de Jo Sisti. Pour l'heure, personne ne peut dire quelles sont les connexions exactes entre toutes ces morts. Mais on peut regretter l'impunité dont bénéficient les assassins en Corse. Je continue de penser qu'au lieu de tout miser sur les juridictions d'exception dont l'inefficacité est chaque jour plus évidente, une corsisation de la police et de la justice porterait ses fruits.

C'est aux Corses d'enfin dire ce qu'ils veulent et de le dire haut et fort. Mais surtout de traduire leur horreur dans leur comportement quotidien. Il faut qu'ils fassent comprendre aux assassins qu'ils ne sont pas les bienvenus. Ils doivent être rejetés comme des parias. Sans un tel volontarisme, le carnage ne s'arrêtera jamais. Enfin, toute personne prise en possession d'une arme interdite doit savoir qu'elle sera sévèrement sanctionnée. Aujourd'hui il n'est plus une fête de village qui ne voient des jeunes ivres et armés risquer à tout instant de passer à l'acte.

Tout cela est parfaitement insupportable et se conclura comme cela s'est déjà passé dans l'histoire de la Corse par le départ de ceux qui refusent de vivre dans une pareille atmosphère mortifère et préfèreront vivre et construire dans de bonnes conditions.


L'assemblée de Corse avait refusé de prendre position après la revendication du FLNC concernant l'assassinat de Leoni. Beaucoup de Corses n'avaient pas compris cette "neutralité". Que va-t-il se passer dans un futur proche si une nouvelle guerre oppose deux bandes? Il est difficile de revendiquer une autonomie plus poussée et de se montrer incapable de seulement condamner les assassinats qui endeuillent notre île. Ce sont des Corses qui tuent d'autres Corses et, à ce titre, c'est à la Corse de prendre ses responsabilités.

5 commentaires:

  1. Jo Sisti était un brave homme. Malheureusement, la Corse est devenue le territoire des crapules et des canailles.

    Les corses ont perdu tout sens des valeurs où la dignité, l'honneur et le sens de la famille n'existent plus.

    Que peut - on attendre d'un pays dominé par la bêtise, la méchanceté et la jalousie ? Partir, sans se retourné.

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  2. Ces assassinés et ces assassins ont des familles où il y a des enfants .100 homicides depuis 5 ans .Cela doit concerner environ 1000 jeunes pour les familles d'assassinés si on calcule qu'il peut y avoir 10 enfants par famille meurtrie (orphelins , neveux , nièces ,enfants d'amis )et encore 1000 jeunes dans les familles d'assasssins !!
    2000 jeunes corses !qui sont choqués ,traumatisés ,déstabilisés , et qui vont très mal et surtout à cause du silence assourdissant de leurs aïnés !Omerta .Ils vont mal et ça se voit dans les établissements scolaires de la plaine orientale (agressivités , violences , xénophobie ,nationalisme )et comme vous le dites dans les fêtes de village et dans le maquis où ils boivent et tirent .
    Partir ? Réagir ?
    Comme l'a écrit Jaurès ''le courage c'est de chercher la vérité et de la dire ''
    Mais on manque de courage désormais dans cette île .
    Même pour protéger les enfants ..

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  3. Sur l'Omerta dans les établissements scolaires...

    http://generation69.blogs.nouvelobs.com/archive/2010/04/11/violences-scolaires-la-corse-n-est-pas-creteil.html

    Cordialement,
    DA

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  4. N'abandonnez pas ce blog ,svp , car comme vous l'écrivez la Corse et les Corses ( nous ) doivent prendre leurs responsabilités .Vos analyses et commentaires sont utiles et le seront dans les mois qui viennent.Ces Pâques sanglantes (3 morts car le restaurateur d'Ajaccio est décédé ) et intolérantes (attentat contre un lieu de culte musulman à Ajaccio ) ne peuvent pas rester sans réactions .Tout le monde doit agir , vous le dites très bien.
    Merci à qui nous cite du Jaurès en cette période et le blog génératon69 est encourageant.

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