mercredi 11 avril 2012

Les constatations du procureur Dallest, expert en scènes de crime


Un commerçant de 39 ans, connu des services de police et neveu de Saïd Tir, caïd marseillais du trafic de drogue abattu en avril 2011, a été tué mercredi soir de plusieurs balles de fusil d'assaut alors qu'il circulait dans sa voiture dans le 3e arrondissement de Marseille.
"C'est une exécution organisée et réussie manifestement", a indiqué à la presse Jacques Dallest, procureur de la République de Marseille et procureur de la JIRS confirmant que la victime, Farid Tir, était un "parent de Saïd Tir, présenté comme son neveu". 
Agé de 59 ans, Saïd Tir était considéré comme l'un des trafiquants les plus influents des quartiers Nord de Marseille et devait être jugé en juillet 2011 pour sa participation à un réseau de trafic de drogue agissant en France, en Espagne, au Maroc et en Algérie. Il avait été abattu deux mois avant le début du procès, le 27 avril en plein après-midi, dans les quartiers Nord de Marseille par un commando de trois hommes.
Deux semaines après sa mort, deux hommes avaient été assassinés en pleine journée dans le quartier de St Mauront. Plusieurs salves de kalachnikov les avaient atteints dans leur voiture alors qu'ils circulaient dans ce quartier du troisième arrondissement de Marseille, non loin du centre-ville. Début juillet, l'un des beaux-frères de Saïd Tir avait également été tué alors qu'il circulait en voiture dans le centre de Marseille.
Mercredi, les faits ont eu lieu vers 20H30 dans le quartier de St Mauront.
Selon le magistrat, l'homme visé était connu des services de police et de justice notamment pour trafic de stupéfiants et d'autres infractions mais pour des faits "pas forcément très récents".
Farid Tir était "très défavorablement" connu des services de police (selon l'expression consacrée qui ne veut rien dire puisque l'opposé est "inconnu des services de police")  et aurait été impliqué dans une vingtaine d'affaires. Il aurait également vécu dans la région lyonnaise.
"Il a été abattu au volant de son véhicule alors qu'il semblait rentrer chez lui", a ajouté M. Dallest, précisant que la victime s'était engagée pour entrer dans un garage souterrain. Un procureur visiblement soucieux des détails à défaut d'efficacité.
"Il a manifestement tenté d'échapper à ses agresseurs en reculant et il a percuté la devanture d'un commerce de l'autre côté de la rue", a détaillé le magistrat.
"Il a été atteint par des projectiles, semble-t-il de fusil d'assaut, ce n'est pas encore absolument certain mais ça ressemble à de la kalachnikov, tiré par un tireur et peut-être un second" a achevé le terrible procureur.
L'autopsie aura lieu jeudi et permettra de savoir si plusieurs armes ont été utilisées, a également indiqué le procureur précisant qu'un "nombre important de projectiles" avaient été tirés et que la victime avait été "très sévèrement atteinte au visage notamment".
L'enquête a été confiée à la police judiciaire de Marseille déjà en charge de nombreux règlements de compte dans la cité phocéenne.
Pour donner un aperçu de l'efficacité de la JIRS, outre la litanie des exécutions corses, jeudi dernier, un jeune homme de 25 ans avait été tué par balles dans la cité Font-Vert (14e arrondissement), située dans les quartiers nord de Marseille, par deux hommes à moto qui avaient pris la fuite.
En 2011, 20 règlements de comptes ont été recensés dans les Bouches-du-Rhône (29 victimes dont 16 morts), dont 15 à Marseille (23 victimes dont 13 morts). D'où un certain doute pour ne pas dire un doute certain sur les résultats de la juridiction d'exception qu'est la JIRS. Rien de personnel contre le procureur Dallest que je ne connais pas. Mais pourquoi ne pas énoncer une vérité toute simple : la lutte contre le crime organisé est une tâche extrêmement difficile qui ne souffre pas d'être comparée à la petite délinquance d'impulsion. Face à des criminels qui préparent leur coup, détruisent les preuves, les résultats seront toujours maigres et décevants. C'est ainsi et il vaudrait mieux l'annoncer comme tel plutôt que de se livrer à une dérisoire bataille de chiffres aussi faux que prétentieux.

Ce qui m'agace prodigieusement est cette course à l'échalote entre la droite et la gauche. Néanmoins je suis persuadé que Nicolas Sarkozy a retiré des armes à la justice en supprimant les policiers de quartier et en lui retirant ainsi des possibilités d'informations essentielles pour la résolution des affaires.

Car, en définitive, la question essentielle n'est pas celle de la spécialisation de la justice (ce qui peut se concevoir) mais les moyens qu'elle se donne pour parvenir à ses fins. A-t-elle le droit d'outrepasser les règles et les lois comme cela est le cas aux Etats-Unis mais aussi en France. Le juge Thiel dans son dernier ouvrage, pose d'ailleurs très bien ce problème. En tant que magistrat il veut être le plus efficace possible. Il doit alors reconnaître que la présence des avocats lors de la première heure de garde-à-vue est pour lui un handicap. Il n'empêche que le législateur en a décidé ainsi. Et c'est au serviteur de la justice de se plier à la décision du législateur.

Dans de telles conditions, le procureur Dallest est (hélas) condamné à commenter toujours plus les scènes de crime et à être peut-être un peu moins performant dans les résolutions de ceux-ci. Tel est le prix à payer pour une démocratie véritable.

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