dimanche 22 avril 2012

Les insectes sont capables d'élaborer des concepts abstraits

Loin des turpitudes corses qui bien souvent me paraissent d'une immense stupidité dans leur sauvagerie et leur animalité, voici une nouvelle qui m'a émerveillé. Les abeilles individus possèdent une intelligence adaptative. On connaissait l'intelligence de la ruche. On sait maintenant qu'il ne s'agit pas que d'une intelligence de groupe. Il reste à connaître les interférences de l'intelligence individuelle sur l'intelligence de groupe. Mieux au Japon, les abeilles ont mis au point un système de défense contre les frelons. Il s'agit de faire groupe autour de l'éclaireur qui vient repérer la ruche à attaquer, de battre des ailes autour de lui et de faire monter la température intérieure au groupe des abeilles au-delà de 40° provoquant ainsi la mort du frelon éclaireur. Sans ce dernier, le groupe de frelons pirates renoncent à son attaque. Or cette découverte faite par quelques abeilles dans une ruche a été progressivement transmise à toutes les ruches japonaises.


Ce frelon est arrivé en France et a déjà provoqué dans le sud-ouest des dégâts considérables. Le seul remède semble d'installer quelques ruches d'abeilles japonaises afin que celles-ci apprennent à leurs sœurs françaises leur méthode. En espérant qu'à l'instar des pinsons, le langage des abeilles japonaises et françaises soit intercommunicable. Des chercheurs ont en effet déterminé que les pinsons sifflaient de manière différente selon les régions où ils s'installaient tout en étant capables d'apprendre le "dialecte" de la région accueillante.


La découverte du CNRS sur l'intelligence des abeilles réduit encore un peu plus la fracture que les hommes ont provoqué entre l'homme et les "bêtes". Nous savons maintenant que de nombreux "animaux" possèdent une vive intelligence, sont capables de sentiments voire d'abstraction. Les éléphants sont par exemple capables de cérémonies funèbres démontrant qu'ils sont capables d'imaginer la différence entre le fait d'être et de ne plus être. Jusqu'alors l'homme pensait être le seul à pouvoir penser la mort autrement que par instinct.


En s'attaquant à l'intelligence individuelle dans le monde des insectes, les chercheurs révolutionne l'approche de la vie jusqu'alors marquée par deux impérialismes : celui de la religion qui a rabaissé les "bêtes" au rang de créature animée proche de robots et celle des matérialistes qui ont placé l'homme au sommet de la pyramide de la vie jusqu'à lui octroyer le droit de détruire la nature à son seul profit. Voici la communication du CNRS.



Les insectes sont capables d'élaborer des concepts abstraits

Le cerveau des insectes est capable de fabriquer et de manipuler des concepts(1) abstraits. Il peut même utiliser simultanément deux concepts différents afin de prendre une décision face à une situation nouvelle. Ce résultat totalement inattendu a été obtenu par l'équipe du professeur Martin Giurfa au centre de recherches sur la cognition animale (CNRS/Université Toulouse III - Paul Sabatier)(2). Cette capacité, que l'on croyait propre aux humains et à quelques primates, montre que des analyses cognitives sophistiquées sont possibles en l'absence de langage et malgré une architecture neurale miniaturisée. Ces travaux, publiés dans la revue PNAS, remettent en cause de nombreuses théories dans des domaines tels que la cognition animale, la psychologie humaine, les neurosciences et l'intelligence artificielle.



La cognition humaine, et notamment nos capacités mathématiques et linguistiques, se base sur notre capacité à manipuler des concepts"? Dans la vie de tous les jours, les concepts qui relient des objets distincts par des règles de relation de type « même », « différent », « plus que », « au-dessus de », prennent une place prépondérante. Par exemple, l'automobiliste est guidé par un réseau complexe de concepts : codes couleur, flèches, panneaux... L'utilisation de tels concepts, que l'on a souvent crue propre à l'homme et à quelques primates, pourrait être en fait beaucoup plus répandue dans le règne animal.

Les chercheurs ont en effet montré que les abeilles sont capables de générer puis de manipuler des concepts afin d'accéder à une source de nourriture. Pour cela, ils ont pris un groupe d'abeilles qu'ils ont entraîné à pénétrer dans une enceinte, afin de récolter de la solution sucrée. Dans cette enceinte, les abeilles rencontraient deux stimuli placés chacun sur une cloison. Chaque stimulus était composé de deux images distinctes soit l'une au-dessus de l'autre (voir photo ci-dessous), soit l'une à côté de l'autre. Au milieu de ces paires d'objets était placé un orifice délivrant, soit une récompense, de l'eau sucrée, soit une punition, une goutte de quinine. Ainsi, les abeilles étaient récompensées sur un concept (par exemple « au-dessus de ») et punies sur l'autre (« à côté de »). Les images variaient constamment tout en maintenant les relations « au-dessus de » et « à côté de » ainsi que leurs associations respectives à la récompense et la punition. Au bout d'une trentaine d'essais les abeilles reconnaissaient sans faute la relation qui les guiderait vers l'eau sucrée.

L'un des tests consistait à placer ces mêmes abeilles devant de nouvelles images. Le seul point commun avec les figures de l'entraînement était leur disposition : « l'une au-dessus de l'autre » et « l'une à côté de l'autre ». Les abeilles, bien que n'ayant jamais vu ces nouvelles images, ont choisi correctement la cible en fonction de cette relation d'ordre abstrait.
Mais ce n'est pas tout : lors de l'entraînement, les images au milieu desquelles se trouvait la récompense étaient toujours différentes entre elles (comme sur la photo ci-dessous). Pour savoir si les abeilles avaient aussi appris cette relation de différence, les chercheurs ont confronté les abeilles à des stimuli nouveaux où les images constituantes respectaient la relation récompensée (par exemple « l'une au-dessus de l'autre ») mais qui étaient soit différentes, soit identiques. Les abeilles ont ignoré les stimuli faits d'images identiques, montrant qu'en plus des concepts « au-dessus / au-dessous » et « à côté », elles manipulaient simultanément le concept de « différence » pour prendre leur décision. 

Cette étude remet en question l'idée que des cerveaux mammifères (dont le nôtre), plus importants en taille, sont nécessaires à l'élaboration d'un savoir conceptuel. Elle démontre aussi que la formation de concepts est possible en l'absence de langage. D'un point de vue philosophique, elle apporte de nouveaux éléments à la discussion sur ce qui serait propre à l'homme. A l'heure actuelle, l'équipe de Martin Giurfa s'attèle à l'identification des réseaux neuronaux responsables de cette conceptualisation.
Notes :
(1) Ici, le terme « concept » est employé dans le cadre des sciences cognitives et il détermine une relation abstraite liant des objets indépendamment de leur nature physique (par exemple, les concepts « au-dessus de / à côté de / différent de… »).
(2) en collaboration avec Adrian Dyer, de l'Université de Melbourne (Australie)

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